Change à terme

Principe du change à terme

Quel est exactement le principe du change à terme ? Sur quelle mécanique se base-t-on pour calculer le cours de change à terme ? Qu'est-ce que le report ? Le déport ? À quoi sert le change à terme ?

Une opération de change en différé

Nous avons vu que le change comptant permet d'échanger 2 devises de façon quasi instantanée (livraison à J+2 ouvrés).

Le change à terme est un instrument permettant d'échanger une devise contre une autre à une date ultérieure : une semaine, un mois, trois mois, six mois, un an… Il est également possible de choisir une date non standard, dite date brisée (en anglais, broken date).

Pour bien montrer qu'il s'agit d'une opération isolée et non liée à une autre opération (comme dans le cas du swap de change décrit dans un autre chapitre) le change à terme est également appelé terme sec (en anglais outright forward ou plus simplement outright).

Le cours d'une opération de change à terme est fixé entre les deux contreparties dès la mise en place de l'opération. Il est presque toujours différent du cours de change au comptant et varie généralement selon l'échéance choisie. Aucune livraison de devise n'intervient avant la date d'échéance sur laquelle les deux contreparties se sont accordées.

Comme on peut le voir sur ce graphique la part du change à terme sec est relativement modeste dans les échanges quotidiens réalisés sur le marché des changes. Pourtant, contrairement à ce que l’on pourrait penser, le change à terme ne date pas d’aujourd’hui (ni même d’hier) car on en trouve trace dès le 19e siècle.

À l'origine, l’intérêt du change à terme s’est souvent manifesté pendant et après des périodes de forts troubles (par exemple des guerres) entraînant instabilité économique et dérèglements monétaires. En effet, le fait de fixer par anticipation le cours d’un couple de devises constitue tout d'abord une garantie contre les fluctuations de change, c'est-à-dire une couverture du risque de change. Mais le change à terme permet aussi de profiter parfois de réelles opportunités de réaliser des opérations spéculatives.

Ce n'est cependant qu'à partir des années 1950/60 que le change à terme s'est développé en s'appuyant sur une liquidité accrue et sur des informations financières de plus en plus fiables et accessibles.

Comment se forme le cours à terme ?

Entrons maintenant dans la partie amusante du change à terme (sec) : son cours. En effet, un cours de change à terme ne représente pas la valeur future d'une devise par rapport à une autre. Il représente la différence de taux d'intérêt d'une devise par rapport à une autre sur une période donnée.

Le change à terme n'est donc pas une opération de change mais une opération de taux. Incroyable me direz-vous ? Mais comment est-ce possible ?

Pour appuyer cette affirmation, je vous propose de partir d'un exemple concret et de voir comment ferait une banque pour couvrir une opération de change à terme initiée par un client.

Exemple :

Un client appelle sa banque pour acheter de l’EUR/USD dans 6 mois.

Comment la banque peut-elle couvrir cette opération de change à terme ? (à part en faisant elle-même une opération strictement identique).

Pour disposer d'EUR/USD dans 6 mois à un prix fixé dès aujourd'hui, la banque peut réaliser les opérations suivantes :

  • tout d’abord effectuer un achat au comptant (rappelez-vous que cela signifie achat d’EUR et vente simultanée d’USD),
  • n’ayant pas l’utilité jusqu'à l'échéance des Euros dont elle a fait l'acquisition, la banque va alors les prêter sur une durée de 6 mois (même échéance que l'opération de change à terme avec le client),
  • comme la transaction en EUR/USD entraîne un paiement en Dollars, devise dont la banque ne dispose pas forcément, celle-ci va les emprunter, toujours sur la même durée.

À l’échéance, la banque va recevoir un capital plus des intérêts en EUR et payer un capital plus des intérêts en USD. Les montants en jeux serviront à établir le cours de change à terme.

L'ensemble des flux associés à ces transactions est représenté dans le schéma ci-dessous :

Flux de change à terme et de sa couverture
Flux de change à terme et sa couverture par un prêt et un emprunt

Bien entendu, une opération inverse avec le client aurait donné lieu à des transactions opposées selon le même principe.

La mécanique exposée repose sur la théorie de Keynes et montre que le cours de change à terme est généralement différent du cours de change au comptant bien que la parité soit possible (égalité des taux d'intérêt de chacune des devises négociées).

Qu'est-ce que la théorie de la parité des taux d'intérêts ?

La théorie de la parité des taux d’intérêts a été présentée par Keynesi en 1923.

Cette théorie stipule que le cours à terme d’un couple de devises XXX/YYY est celui qui rend indifférent un investisseur à se porter sur la devise XXX ou sur la devise YYY.

Autrement dit, il doit être équivalent pour un investisseur :

C'est ce qu'illustre le schéma ci-dessous :

Théorie de la parité des taux
Théorie de la parité des taux d'intérêts

Si les montants m1' XXX et m2' XXX sont égaux, alors la parité des taux d'intérêts est respectée.

Le principe de la parité des taux, sous-entend que toute différence de taux entre 2 devises donnera lieu à un écart entre le cours de change à terme et le cours de change comptant de ces 2 devises.

À noter que toute divergence entre l'écart de taux et le cours à terme résultant donnerait lieu immédiatement à des opérations d'arbitragei qui tendraient à revenir à un point d'équilibre.

Pour conclure, et contrairement à ce que beaucoup pensent, un cours de change à terme n'est pas une anticipation de ce que sera le cours de change comptant à une date donnée.

Nous verrons dans le chapitre Formulation du cours de change à terme que cette formulation simplifiée nécessite quelques explications et enrichissements pour qu'en découle une formule mathématique.